Et si le monde paysan, réputé archaïque et conservateur, commençait à incarner la vraie modernité ? Telle est bien la question qu'a posée l'extraordinaire écho rencontré depuis l'été 1999 par l'action symbolique du "démontage" du McDonald's de Millau : cette initiative de la Confédération paysanne visait à dénoncer la "malbouffe" produite par l'agriculture industrielle et la mondialisation incontrôlée. Mais elle était aussi porteuse d' alternative : celle d'une "agriculture paysanne" proche des préoccupations des consommateurs.
C'est cet espoir qu'incarne aux yeux des médias José Bové, éleveur de brebis sur le Larzac, incarcéré à la suite de l'action de Millau, et libéré à l'issue d'une étonnante campagne de mobilisation à l'échelle internationale. Pour autant, il est loin d'être le seul dans son combat. Avec François Dufour, porte-parole de la Confédération paysanne, il s'en explique dans ce livre-événement. Revant sur l'été 1999, ils racontent, de façon très vivante, comment ces actions s'inscrivent dans le mouvmeent engagé depuis plus de vingts ans par un nombre croissant d'agriculteurs : ceux qui ont rompu avec le productivisme à outrace prôné par l'Union européenne, qui refusent la désertification des campagnes et la surproduction de viandes, de fruits et de légumes sans goût ou immangeables.
Surtout, ils explorent les voies de l'avenir : produire mieux et autrement ; créer de nouveaux emplois paysans ; préserver l'environnement et les ressources naturelles.(...)

Gilles Luneau, journaliste indépendant, est spécialiste des questions agricoles et rurales au Nouvel Observateur et à Challenges. Il interroge José Bové, que je ne présente pas, et François Dufour, agriculteur en Normandie et secrétaire national, porte-parole de la Confédération paysanne.

Il ne faut pas s'attendre à rencontrer ici José Bové candidat. On est en 2000 et ici, il témoigne simplement, à égalité de trente années de militantisme avec son comparse, de son expérience et de ses connaissances, analyse l'économie française et mondiale du point de vue de sa politique agricole, avec François Dufour. Ce sont des pages très difficiles à lire, j'imagine, pour qui n'a rudiment d'économie, j'ai trouvé ça à la fois calé et passionnant. Démoralisant aussi.
Les dégâts sociaux, économiques et environnementaux du productivisme à outrance ne sont plus à démontrer (je vous recommande les passages frankensteinien sur les OGM ! la prochaine fois qu'il faudra en faucher, je l'écris devant témoins, je serai volontaire ! sans compter la prétention à breveter le vivant), quant à l'impact des politiques de l'OMC, et le dévoiement du GATT, ils font le lit du commerce équitable qui ne semble alors plus une utopie, mais une solution de bon sens, une mondialisation indispensable. Il ne faut pas confondre cela, insiste-t-il, avec le "souverainisme", qui n'est rien d'autre qu'une attitude frileuse, aussi irresponsable que l'ultra-libéralisme.
En conclusion, la place assumée du "pot de terre", mais un formidable espoir né du mouvement de solidarité de la manifestation à Seattle.

Il manquerait de savoir ce que, sept ans après, nos deux auteurs diraient de ce qu'il en reste.

RELEASE NOTES:

Posté à inngrid.

Amusant de recevoir ça la veille du premier tour de l'élection à laquelle Bové est candidat !

Depuis ses opérations de fauchage volontaire, visant indistinctement les OGM à but thérapeutique et les autres, j'ai une grosse, grosse dent contre Bové.
Mais je suis dans les biotechnologies et à ce titre sûrement pas objective... alors je tenais à me faire une opinion un peu plus construite et juste, et ce livre tombe très bien. Malgré tout ce que je peux lui reprocher, Bové est un homme instruit, très au fait justement de ce que sont les biotechnologies (son père en est un pionnier), et je suis curieuse de comprendre ce qui l'a conduit à mener son combat, qui va bien au delà de la malbouffe.

Merci beaucoup DonaJuana, je tâcherai de le lire rapidement, et je le proposerai ensuite en ring.