L'exécution de Troppmann

by Ivan Tourguéniev | Nonfiction | This book has not been rated.
ISBN: 2851978209 Global Overview for this book
Registered by Victor-Schmara of Lille, Nord-Pas-de-Calais France on 10/13/2022
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Journal Entry 1 by Victor-Schmara from Lille, Nord-Pas-de-Calais France on Thursday, October 13, 2022

À vélo, j'écoute des podcasts.
Ce jour-là, "Hondelatte raconte" abordait Le massacre de Pantin, en 1869.
Fait divers aussi oublié que sordide (8 victimes d'une même famille, de Roubaix), dont la particularité est qu'il fut très largement couvert par une Presse cynique, notamment Le Petit Journal, qui tripla ses ventes durant toute l'affaire.

En fin de narration, Hondelatte révèle que l'exécution -publique- attira des "personnalités", telles que Maxime Du Camp (célèbre à l'époque, mais que la postérité considère définitivement comme un "sous-Flaubert") et son ami Ivan Tourgueniev (photo, 1818-1883), novelliste, romancier et auteur de théâtre reconnu.
Ce dernier en ressort sérieusement ébranlé, et se sent tenu, dans un court livre (70 pages), de raconter.
Ça m'a intrigué ; je voulais ce livre.
Neige78 a eu la bonne idée de me l'offrir. Merci !

Ce 19 janvier 1870, le Second Empire vit ses derniers mois : la guerre contre la Prusse commence en juillet.
Le condamné, Jean-Baptiste Troppmann, 20 ans, vient de se voir refuser ses recours en grâce.
Il va mourir.
L'affaire ayant tant défrayé la chronique, les autorités traitent l'exécution comme un événement, et organisent, dans les murs-mêmes de la prison de la Roquette, une sorte de dîner mondain : "Venez, fêtons l'action de la justice, et si vous êtes encore là, on lui coupe la tête à 7h00. Depuis les fenêtres, vous verrez bien."

Le récit de Tourgueniev est édifiant.
Il arrive, se mêle aux convives -tous des hommes-, dans une ambiance surréaliste de légèreté et d'embarras. On dîne, on boit, certains plaisantent, mollement. Vers 6h00 on convie la petite troupe, "Venez, on va l'extraire de sa cellule", "Venez, on va lui couper les cheveux et tailler sa chemise" ; Tourgueniev suit, observe, effaré.

Et quand enfin on couche le criminel sur l'échafaud, pour lui c'en est trop ; il détourne le regard, entend tomber le couperet, le murmure de la foule amassée, et manque de défaillir.

Le dernier chapitre (6 pages) est magistral. Il faut le lire.
Il est là, écoeuré. Il considère le peuple venu en nombre, repartant le pas lourd et les yeux dans le vide, vaguement déçu :
"Personne de nous, absolument personne, n'avait l'air d'un homme qui avait assisté à l'exécution d'un acte de justice sociale."
Il tente de comprendre, et finalement pose sur la peine de mort un jugement critique, intime, vécu, dont presque tous les arguments, point par point, seront repris à l'Assemblée 111 ans plus tard, et conduiront à son abolition.

Éditions de l'Herne, 2016, 70 p.
(offert)

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